Ne jamais s’excuser /  Conséquence de la suprématie grandissante du politiquement correct et de l’apparition d’une nouvelle forêt peuplée de caméras, de perches à micros, de téléphones portables, de paraboles en tous genres plus personne n’est à l’abri de voir un propos malvenu répété et démultiplié à l’infini sur le net. Les mots sont des éclairs qui le plus souvent échappent à leurs propriétaires pour faire mouche à la une des média. Leurs propriétaires doivent aujourd’hui se méfier des flashes et des sunlights et redécouvrent, après le tout est bon pour faire parler de soi, l’urgence de se taire. Ou de savoir parler. L’époque est à la repentance et à l’excuse qu’il faut savoir dégainer aussi vite que la “connerie” est sortie la de la bouche de son malheureux propriétaire.

    Plus un geste, plus un mot n’échappe aux censeurs du politiquement correct et de l’anti-racisme à tout crin. Le dérapage verbal, surtout s’il a une connotation “raciste” est devenu le crime social absolu. Comme si le racisme n’était pas partout : contre les riches, les pauvres, les moches, les beaux, les vieux, les jeunes, les intelligents, les cons. Ainsi le malheureux John Galliano alcoolisé explosera en plein vol victime d’un drone médiatique.

    La parade réside le plus souvent dans l’exercice compliqué de la rédaction d’un communiqué de presse ou à une mise au point face à un journaliste droit comme la justice. Eternel courtisan à l’esprit et à la langue acérés le polyglotte Karl Lagerfeld s’est retrouvé sur le siège du supplicié au journal de 20 heures invité à sa demande par France 2 à s’expliquer face aux Français sur

son crime de lèse-Président. Le bon peuple qui n’en demandait pas tant assista aux explications du roi Karl se tordant les bras : “je ne parle pas l’Espagnol, je trouve que François Hollande a beaucoup d’esprit ». Brice Hortefeux attendra, trop longtemps, de ne plus être aux affaires pour admettre que son quart d’heure de racisme ordinaire contre les “arabes trop nombreux” fut le pire moment de son passage au gouvernement, ce dont beaucoup se doutaient. Tout l’exercice consiste à ne pas s’excuser, cela serait donner raison à ses accusateurs, mais de jurer que l’on a dit le contraire, que les micros ont mal entendu. Et c’est souvent vrai.

Même un anonyme salarié surmené de chez Orange qui trouve moins bien payé que lui en la personne d’une agent de la SNCF et l’abreuve de son mépris sur un quai de gare en banlieue a droit à son quart d’heure de célébrité et aux justifications de sa direction qui se fend d’un communiqué de presse pour expliquer qu’il est surmené et qu’il ne gagne pas tant que çà. Comme un grand :-)

    Sans oublier la concierge de Patrick Besson, chroniqueur au Point, qui diffuse des communiqués de presse pour poser ses dates de vacances et les heures d’ouverture de sa loge.

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